L1 - Racines

 

(sergent 20 à 22) Dès l'Antiquité, on s'en préoccupait. En 1583, l'anglais Stephens note des ressemblances entre langues de l'Inde, latin et grec. Des Hollandais comparent des langues d'Europe à persan et langues indiennes. ( ibidem 67) distingue groupe génétique et groupe aréal: "est génétique un groupe de langues descendant d'une ancestrale" comme rix gaulois et rex latin. "est aréal celui qui résulte du mélange, de la cohabitation" comme lansa (lance) gaulois, puis latin. Les traces gauloises en allemand, et russe sont sans doute aréales, alors qu'en anglais, ce sont les traces anglo-saxonnes, puis franco-normandes qui le sont, comme en français, les latines: En effet, malgré l'abondance des vocabulaires non-celtes, anglais, français, yiddish ont conservé 2 traits gaulois fondamentaux: l'ordre des phrases et le rôle amoindri des déclinaisons. On parle avec des mots d'origine variée, mais on pense en gaulois, germain ou slave !

Selon (ruhlen 21), on ne connaît en linguistique que trois mécanismes pour expliquer les ressemblances entre cognats:

convergence: ressemblance accidentelle ou onomatopée: mama, papa, brrr, bzzz, horreur, aïe.

emprunt: empruntés avec le produit, (tabac, hamac) parfois imposés par le conquérant: le celte et l'illyrien furent supplantés plutôt brutalement. En yiddish, il y eut sans doute successivement un judéo-araméen, puis judéo-grec, judéo-latin, judéo-roman, judéo-germanique, judéo-slave, et en permanence, l'hébreu. Ainsi à logl, cruchon, je ne trouve qu'un cognat: le latin loculus de même sens.

origine commune: En se basant sur syntaxe et vocabulaire, il semble y avoir eu non pas une, mais trois langues-mères du yiddish: hébreu, francais, allemand. Le premier reste vivant grâce au kheyder, l'école obligatoire où l'on apprenait la langue sacrée. Le second n'a laissé que quelques mots, mais une façon de tourner les phrases et quelques pluriels en "s", quant au troisième, il représente la grande masse du vocabulaire, enrichi de quelques centaines de mots slaves.

La plupart des langues modernes d'Europe commencent à s'écrire au 9e s. mais le yiddish, comme bien d'autres, n'a laissé nulle trace écrite avant 1273: en ces temps sans papier ni imprimerie, pas question de gaspiller du velin pour un parler sans prestige. La première allusion, c'est ibn Khordabeh qui, vers 860, dit des Rhadanites qu'ils parlent "farangui", la langue des Francs. Les glossaires franciques de Reichenau et de Cassel montrent bien des mots qui seraient compris aujourd'hui.

Seconde allusion: Rashi, vers 1040 découvre à Worms le "leshon ashkenaz", langue d'Arménie.

Benjamin de Tudèle, vers 1170, dit que les pays slaves sont appelés knaan (Canaan) parce que les parents vendent leurs enfants. On suppose un judéo-slave car (nosek 6) deux savants de Prague, Abraham ben Azriel et Isaac ben Moshé "ont introduit dans leur hébreu du 13e s. des notices en langue slave". Est-ce pourquoi des "slavo-yiddish" sont plus proches du tchèque que du polonais ?

Je n'ai rien contre ou pour Germains, Slaves, Juifs, Grecs, Gaulois ou Romains. Certains de leurs mots sont devenus yiddish, c'est tout. Traces de notre histoire, chacun a son importance. Nul ne dit que les latinismes du français n'ont rien à voir avec l'histoire de la Gaule, alors pourquoi renâcler sur nos celtismes et turquismes ?

La linguistique est née grâce à des tableaux comparatifs, qui permirent de définir l'indo-européen. Le mien compare quelques mots yiddish au gaulois (authentique ou reconstruit par les savants, à partir de textes anciens, inscriptions, toponymes, néo-celtique, etc..) et à des cognats d'autres langues, en soulignant au passage quelques français d'origine celte pas toujours signalés par les dictionnaires courants. Pour un linguiste sérieux, tout mot médiéval des parlers "romans" ou "néo-celtes" qui ne dérive pas de latin, francique, grec ou arabe, est presqu'à coup sûr d'origine gauloise. Donc, presque tous les latins pop, impérial, pré-celtique ou *francique, sont fantasmes de latinolâtres. La latinomanie invente des vocables fantaisistes pour nier des gaulois évidents. Le si gaulois galant viendrait de l'imaginaire °walare francique, rang de ring francique: une droite venue d'un anneau. Et la bille d'un *bik-kil, (dé) francique et cubique attesté nulle part. C'est de la géométrie non-euclidienne ou plutôt du contorsionisme anti-celte caractérisé. Les Bretons rigolent en lisant comment s'explique "j'y vois que dalle" (un dall est un aveugle breton) et les Occitans pour reluquer, qui vient tout bonnement du gaulois arelucō par l'occitan relucar. Ne parlons pas d'abbé, samedi, alphabet, vin, bachelier, pucelle : aucune allusion à une origine hébraïque ou sémitique pourtant avérée. Des mots gaulois viennent de contacts gréco-phéniciens: L'alphabet grec en provient, de l'aveu même des Grecs (mais les Etrusques ont joué un rôle majeur) Europe, que Zeus enleva, était princesse phénicienne, devenue ainsi immigrée sans papiers.

(Bien des mots gaulois, (glaive, lance…) adoptés par les Romains, reviennent latins dans les dicos.

 

 

Abréviations: (les 30 mots français soulignés sont probablement d'origine gauloise)

 

A: allemand - Al: alsacien- Bé: biélorusse - B: breton- C: catalan -D: dialecte allemand- E: anglais -Es: espagnol F: Français - Gl: gaélique - Gr: grec - H: hébreu - I: irlandais - It: italien - Ja: judéo-alsacien - K : kurde - L: latin - Li: lituanien -ל: luxembourgeois - Oc: occitan - Os: ostique - Ot: ossète - P: polonais - R: russe - Sc: serbo-croate - Sd: suédois -

T: tchèque - U: ukrainien - V: vieux - W: gallois - » : sens voisin

 

YIDDISH GAULOIS AUTRE le plus voisin

 

 

amt (service) ambatanios (serviteur) A: Amt

anshtot (au lieu de) anstatlō (interrompre) A: anstatt

arbet (travail) arbetō (économiser) B: arboell (épargne) - Sd: arbet

arest (arrêt) arestamen P: areszt

blote (boue) borua P: bloto - B: blod (terre meuble)

bokher (jeune homme, bachelier) baccos (garçon) H: bakhur Gr: βαχος E: bachelor W: bachgen

breg (berge) bariga Al: broi - R: berieg - U: bereg

brengn (apporter) adbrincō (amener) A: bringen

brodyen (patauger) bredō Li: bristi - R: brod (gué)

broyzn (bouillonner, ~brouet) embrutiō A: brühe - C: brollar

breyzl (miette, VF briche) brustos D: brösel B: bruzun I: briciola W:briwsionyn

davenen (prier en hébreu) deuocaros (pieux) VF: deviner - VEs: adivinar (souhaiter)

epl (pomme) aballo E: apple - Os: apel - Li: obuolys - R: yabloko

ergets (n'importe où) arecertō (explorer) B: ergerzadenn (exploration)

geleger (lit, couche) uolegion B: gwele - W: gwely - Li: guo'lis

gorshitse (mauvaise herbe) garua (garenne) P,R, Li: gorshitsa (moutarde)

guzme (galéjade) gaua, galio (gai) indo-eur: K: galte - Ot: gædij - B: gaou - Al: galgamani

gevald (danger) uelatos (puissant, prince) B: galloud - I: Ulster - Os: valdjan - R: vlast - A: gewalt

havn (port, hâvre) adbero (estuaire) E: haven - B: aber - Oc: aven

hokn (crochet) ancatos (hameçon) A: Haken

kader (cadre militaire) caddo (dignité) R: kadra - B: kadarn (courageux)

karahor (ronde d'enfants) coros (ronde, cercle) B: koroll - R: karaulof -VF: carole - E: carol

karlik (nain) corrios U: karlik - B: korr

kat (bourreau) caternos (guerrier) P: kat

kayer (mâchoire) cernos B: karvan - W: cern

khapn (happer, serrer) crappaō B: khapats - T: chapani - U: khapati

klub (fesse) clunis (L: clunis) B: klun - W: clun

kovel (forgeron) gobos P, U: kowal - B: gov - W: gof

koydesh (saint, sacré) caddos H: kadesh - Gr: καθαρος (pur)

kurts (court) certos (L: curtus) A: kurz - K: kurt (indo- eur)

lepish (gauche) laibos (L: lævus) P: lewy

leyenen (lire) lemnō B: lenn - Es: leyendo (lisant)

lokirn (regarder) arelucō E: look -Es, Oc: relucar

marudyen (marmonner) marunata (chant funèbre) B: maronad - Bé: markotny (triste)

murashke (fourmi) moruio B: merien - U: murashka

opl (nombril) ambilo (L: umbilicus) Gr: ομφαλος

pil (pilule) bilia (bille) A: Pille - E: pill

rang (rang, importance) adranda B: rann - E: rank - K: razandin (ranger)

raytn (chevaucher) ambiretō (se rendre) A: reiten - E: ride - B: redeg (parcourir)

rond (classe, rang) adranda B: rann -Bé: rad

shlungn (avaler) slungō Gl: sluig - A: verschlucken

shvitsen (siffler) suitō Bé: svistats - P: świstać

tate (papa) tatis B,W: tad - Al: tate, B,P, Sc: tata

tormaz (frein) tarauō (frotter) B: tarav - Bé, R: tormaz

torn nisht (devoir ne pas) toriō (obéir) Gl: toirsmig (interdire)

trakt (route, étendue) tractos (plage) Bé, U: trakt

tsemishenish (confusion) mescis R: smieshenie

tsung (langue) tenga A: Zunge

umkum (mort violente) anco B: ankou - A: umkommen

veverke (écureuil) ueuer T: veverka - W: gwinwer - Li: voveré

yayen (vin, hébraïsme) oinos Gr: οινος -H.: yaïn

yo (oui) iacto Al: yo - A: ja - B: ya - ל: jo

yoykh (bouillon) iutta (jus, bouillon) L: jus - Sc: juha

zamsh (chamois camox R, U: zamsha

 

 

Bien sûr, quelques mots gaulois cités sont "reconstitués", mais ceux proches du latin sont au

 

thentiques ainsi que tous les mots de la dernière colonne. En tous cas, même douteux, ces vocables rendent mieux compte des parentés des mots modernes que les délires germanophiles d'érudits latinomanes.