des Chaldéens à Caligula

L'Assyrie s'écroule en ~610. En ~587 Nabuchodonosor prend Jérusalem et déporte les Judéens en Chaldée: Captivité de Babylone. Les "Bablim" écrivent la première Tora, prient en hébreu, parlent araméen. Cultivateurs, artisans ou marchands aspirant au retour, beaucoup resteront lorsqu'ils auront le choix. Techniques et plantes passent d'Orient en Occident et vice-versa. Pêches, poires, melons, luzerne, riz, canards, citrons, dattes, pois, sésame, nous sont ainsi parvenus. (ghirshmann 181): "Le commerce mondial ... touche les régions du Danube et du Rhin, et des monnaies …dans des cachettes en illustrent l'ampleur: épices, perles de verre d'Egypte, ambre du nord... Le volume du commerce du ~VI-Ve s. dépasse tout ce que l'ancien Orient avait réalisé". (c'est l'époque de la splendeur étrusque, qui "civilisa", un peu, les Gaulois)  (werner 144): La tombe celte de Hochdorf, près Stuttgart (un portage entre Neckar et Danube y relie mer du Nord à mer Noire), datée de ~550, livra des tissus de soie, ignorée des Romains jusqu'à ~53 ! Cela expliquerait-il les tissus aériens (keller ** 242) des danseuses étrusques ?  wheeler suppose que le fer arriva en Chine par l'Inde, qui le tenait des Achéménides. needham dit par le Nord-est, étrange trajet, pourtant vraisemblable: il était plus facile de naviguer que de franchir les Himalayas ou le Gobi. (ghirshmann 182): Le trafic porte sur des objets courants: "Grâce à l'introduction de la monnaie, le commerce intérieur se développe, la monnaie favorise... l'activité des banques. La banque, sans doute juive, d'Egibi (Jacob) à Babylone, fondée au ~VIIe s. pratiquait les opérations de mont-de-piété, les crédits mobiliers et les dépôts, elle connaissait les.. comptes courants et les chèques". La générosité de Cyrus, permettant aux exilés de revenir à Sion, fut peut-être influencée par les nécessités du grand commerce.

 

et les Phéniciens, et les Grecs ?

Phéniciens et Hébreux collaboraient au temps de Salomon. Ils semblent avoir été pionniers dans l'emploi monétaire de métaux précieux "au poids" en vrac, morceaux ou lamelles. Ezéchiel, mort vers ~570 maudit Tyr  (Ez 27) Il décrit ses rapports avec Perse, Libye, Lydie, Tharsis (Tartessos, ancêtre de Cadix) Yavan (Ionie) Thogarma (Arménie) Thubal (Géorgie ?) Edom, Arabie, Eden, Assur, Médie. "Juda et le pays d'Israël trafiquaient avec toi"  (Ez 27, 17)  Cette liste  montre que leurs caravanes d'ânes jouaient un rôle peut-être plus grand que les navires sur lesquels tous focalisent..          

Après Alexandre, les Séleucides (~312 / ~147) intensifient ce trafic et l'étendent au monde hellénistique. Les rapports entre Grecs et Juifs vont de l'association (hors de Judée, en Afrique du Nord, Egypte mais surtout Anatolie) à la guerre (Machabées) selon lieux ou époques. Les antiques kehiles (communautés) de Djerba et Mogador suggèrent un partenariat avec Phéniciens puis Carthaginois, ainsi qu'un commerce transsaharien vers l'Afrique noire. En mer Noire, lac grec, les Juifs devaient jouer un rôle: Au musée Pouchkine à Moscou, j'ai vu une tête barbue en verre filé, spécialité carthaginoise, trouvée à Tyras (vers la Crimée). Qui l'y avait portée, si les Grecs, tenant le Bosphore, interdisaient le passage aux concurrents ? Se contentaient-t'ils d'un péage ? En Ionie, les très nombreux Juifs sont si bien intégrés que le Talmud (Sabbat 147b) déplore: "Les bains de Dimsith (Pamukalé ?) et les vins de Perugita (Phrygie) ont séparé  les 10 tribus d'Israël" Ptolémée s'étant emparé de Jérusalem envoya (AJ,XII,1) des Juifs en Egypte, soldats, avec un statut identique à celui des Macédoniens. meleze montre des Juifs d'Egypte servant dans l'armée. Antiochus ayant repris la Judée envoya (AJ,XII,3,456) des paysans-soldats juifs en Lydie et Phrygie barrer la route aux Galates récemment installés. Les Galates, dont l'activité commerciale est avérée (rastofstief, passim) dans le monde hellénistique puis l'empire romain, très probable dans l'Europe celte, y compris comme marchands de tapis et d'esclaves, ont-ils collaboré ou non avec des Juifs ? Que certains aient délaissé le culte de Cybèle[1] pour le judaïsme, c’est possible: les commerçants juifs avaient besoin de partenaires, qui purent se convertir à leur fréquentation. Il suffit de regarder Ankara/Ancyre sur la carte: les caravanes arrivant d'Arménie pouvaient descendre le Halys (Kizil-Irmak) aboutissant non loin de Samsoun, sur la mer Noire. Mais il valait mieux  descendre la rivière Ancyre vers le Sangarios (Sakarya), qui coule vers Nicée, à deux pas de la mer de Marmara et de Byzance. Ancyre était une étape obligée de cette route de la soie hellénistique.

   

 

 

 


 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 
Djerba

                                                                GEOGRAPHIE   YIDDISHO-RABBINIQUE

 

1/ AMALEK (Russie, Arabie)           2/ ARAM (Araméens)        3/ ARARAT (Ourartou)

4/ ARKANOS (Hyrcanie, SE Caspienne)                                      5/ ASHKENAZ (Arménie, Scythie, Allemagne)

6/ ASHUR (Assyrie)                          7/ BABEL (Babylonie)       8/ EDOM (Jordanie, Rome)

9/ ESTRAYKH (Autriche) 10/ HAGAR (Hongrie)       11/ KAFTOR (Crète)

12/ KHETH (Hittites)                         13/ KITTIM (Chypre, Romains)

14/ KNAAN (Canaan, Slaves)          15/ KUZARIM (Khazars) 16/ LOTER (Lotharingie, vallée du Rhin)

17/ MISRAIM (Egypte)                     18/ PELISHTIM (Philistins, Palestine)

19/ PERUGITA (Phrygie)  20/ PEYHEM (Bohême)     21/ POLIN (Pologne)

22/ PORAS (Perse)                            23/ PROVENSE (Occitanie)

24/ SEFARAD (Espagne)                 25/ SIUN (Sion, Israël)       26/ SOR (Tyr, Phénicie)

27/ TSARFAT (France nord)           28/ YAVAN (Ionie, Grèce)     SINEAR:  Mésopotamie

 

 

 

 

 

 

 
 

 



 

  pinardiers nostalgiques, les Romains arrivent

Retournons en Judée. Les livres des Macchabées, racontent une longue guerre terminée par l'indépendance des Asmonéens et le retrait des Séleucides. Leur royaume dépassa en surface celui de Salomon et contraignit (johnson, 120) ses habitants, Moabites, Iduméens, Arabes…. à se convertir au judaïsme ou déguerpir, probable source de nombreux conflits ultérieurs et d'une haine féroce, décrite par Josèphe.

Les Romains avaient bien des défauts, mais de solides principes. En particulier, ils analysaient leurs échecs et n'hésitaient pas à copier leurs vainqueurs. Les mots "glaive, lance", sont gaulois, les hélépoles, onagres, balistes, catapultes, etc.. sont grecs. D'autres emprunts sont étrusques. Ils ne faisaient certes pas que copier, mais copies ou inventions, la plupart sont guerrières. Pourtant, leur arme la plus puissante fut "civile", sans doute volée aux Etrusques, qui joua un rôle majeur dans leur expansion: la pasteurisation. Ils devinrent si grands commerçants que lorsque Mithridate (le bohec 23) voulut les combattre, en ~88, il massacra, dans la seule Anatolie du Nord, plus de 80 000 commerçants romains; ils devaient donc grouiller tout autour de la Méditerranée. Leur secret: leur vin n'aigrissait pas, car d'abord bouilli, puis les amphores bouchées à la cire. En Gaule, César avait été  précédé  par céramique (d'Arezzo, en Etrurie), huile et surtout vins italiens.  (goudineau 16): "150 000 hectolitres annuellement... dans toutes les Gaules". La plupart des tribus de Gaule "alignèrent le poids de leur numéraire sur le demi-denier romain". On se doute que ce  pinard était payé surtout en or et en esclaves. Cette période dura peu, la nécessité de ravitailler les garnisons lointaines fit cultiver la vigne aux alentours, (Savoie, Provence, Alsace, Aquitaine...) D'où le succès de Virgile, de ses Bucoliques ou Géorgiques, "O, fortunatus, ...agricola." (O, veinard, le bouseux..) qui chantent un monde disparu et regretté, où les vins de Campanie comme de Falerne rendaient la vie si agréable aux cultivateurs, et plus encore aux sénateurs... car ils s'exportaient si bien. Il est vrai (roman 126) que le commerce était interdit aux sénateurs depuis la lex Claudia en ~218, quoique Cicéron (ibidem 125) distinguât dans (Les Devoirs, I, 150) le vil petit commerce et le grand, "approvisionnant, sans fraude, beaucoup de gens" Après la conquête des Gaules, une nouvelle idéologie fit délaisser le commerce aux peuples conquis: Grecs, Juifs, Gaulois (Les "nobles" Romains devenant plutôt banquiers, armateurs, usuriers) (will 35) cite Appien: en ~41, "Antoine... n'avait d'autres reproches  à adresser aux Palmyréniens, placés entre Romains et Parthes, que leur adroite politique. C'était des marchands qui cherchaient en Perse les produits de l'Inde et de l'Arabie pour les revendre chez les Romains" (L'imbécile, voulant les piller, provoqua une guerre parthique)

En Mésopotamie,  (ghirshmann 230)  "l'intervention brutale de Rome entraîne une crise économique profonde" qui s'accentuera sans cesse: extension du banditisme et de l'insécurité, surtout dans les zônes frontalières où les Romains multiplient incursions, extorsions et pillages, provoquant des révoltes anti-romaines : (Josèphe BJ, III,9): les Judéens deviennent de redoutés pirates côtiers pendant la terrible guerre des Juifs.   

Selon rastofstief les Romains furent piètres économistes, les Byzantins pires. (ducellier  100) : Théophile (829 - 842) allié des Khazars, apprend que son épouse Théodora attend un navire de commerce (sans doute khazar) il brûle le bateau et menace l'impératrice de mort si elle recommence. Certes, le Bas-Empire montre qu'un changement s'amorçait, lorsque les guerres de conquête (et pillage) font place aux guerres défensives. Mais ce basculement fut entravé par les chrétiens, encore plus obtus que leurs adversaires païens, qui, sous prétexte de charité, ruinaient les commerçants accusés de rapacité. (le transport gratis pro deo de lourdes charges n’est guère rentable)

Intégrés de longue date à la république romaine, les Juifs sont appréciés jusqu'à Tibère, mais il est difficile à un Juif pieux de considérer qu’un homme, fût-il empereur, est un dieu. Le revirement tibérien fut suivi par les "folies" de Caligula. Mon explication n’est pas celle de (Josèphe. AJ XVI,X) qui ne comprend pas cette haine fort antique des autres nations, puisqu'elle existait déja chez les Egyptiens du temps de Moïse, ou les Perses du temps d'Esther. Sauf si Grecs d'Asie et Syriens rancuniers, se souvenant des conversions forcées des Asmonéens, avaient raconté des horreurs aux occupants Romains. A mon avis, ce n’était pas nécessaire, la divinité exclusive de Yaweh étant incompatible avec un panthéon (temple de tous les dieux).  Bien sûr, le pauvre Josèphe n'avait encore rien vu, comme les massacres sous Trajan et les délires chrétiens le démontreraient quelques années ou siècles plus tard.

 

 

Note: La Cappadoce, ultra-chrétienne ? Cette région fut chrétienne jusqu’en 1926 et regorge d’églises fort anciennes, taillées dans la roche tendre, mais malheureusement très dégradées par des graffiti, souvent en grec. Actuellement, les habitants sont musulmans. Visitant Zelvé en 1985, les jeunes filles locales, musulmanes, vendaient aux touristes de splendides poupées (prohibées par l'Islam). Trônant en bonne place dans tous les cafés musulmans où nous sommes entrés. Très variées, mais toutes avec bras ouverts, bottines, bonnet conique, seins "caractérisés" par un disque de tissu de couleur différente sur le corsage. De petites têtes en lieu de mains. Or, les musées, (J’ai regretté qu’on n’y voie aucun vestige galate, sinon un petit bracelet en forme de torque, baptisé « hellénistique ») notamment celui d’Ankara que j’ai visité, montrent des déesses avec tout ou partie de ces signes distinctifs.  (Raci Temizer) : fig. 14,  Çatal-höyük (Chatal-heuyuk)  ~7e millénaire ! fig. 61, 62, Alacahöyük (Aladjaheuyuk)  ~3e millénaire, fig. 76, Toptastepe,  ~3e  millénaire. Avatars de notre increvable Kubaba-Cybèle-Artémis-Diane-Marie ? Toujours à la mode en ex-chrétienne Cappadoce, je l'ai constaté de visu.



[1] Revenons sur ces Galates adorateurs de Kubaba-Cybèle-Artèmis. Les Juifs leur empruntèrent peut-être certains aspects (la résurrection des morts) de ce culte qui influença les philosophes (néo-platonisme), les coutumes européennes (feux de la St-Jean, arbres de mai), le  christianisme (déesse-mère vierge, fils divin sacrifié et renaissant au printemps), les soufistes (adoration de la lune, auto-mutilation des mystes, danses tournoyantes) et les musulmans (bétyles sacrés). Les premiers chrétiens, dit-on, furent surtout des prosélytes juifs. A une exception près: Les Galates restèrent si Juifs que Saint-Paul ne put leur faire abandonner la Tora. Alors qu'en Cappadoce voisine, les saints fourmillent: Georges, Barbara, Onuphre, Grégoire de Nazianze, Grégoire de Nysse, etc... je n'ai trouvé aucun saint Galate ! [Sauf, qui sait, Blandine,venue d'Ionie mais au nom latino-celte ("caressante" en latin, ou "douce" en gaulois)] Disparus des textes après 400, ont-ils fui vers l'Est (sassanide) ou le Nord (ostrogoth) ? Ont-ils joué un rôle décisif dans le choix du judaïsme, ou plutôt du karaïsme, par les Khazars ?

 

HEBREUX